Après les mobilisations massives d’agriculteurs néerlandais contre le plan azote de leur gouvernement l’été dernier, la situation semble plus apaisée aux Pays-Bas. Pour autant, la trajectoire définie par le pays pour réduire les émissions et se conformer aux exigences européennes, n’est pas modifiée.
Pour réduire les émissions d'azote, les Pays-Bas vont devoir diminuer la taille des cheptels. (©Pixabay)
L’été dernier, les Pays-Bas ont connu de fortes mobilisations d’agriculteurs, inquiets d’une potentielle réduction du cheptel de près de 30 % pour répondre aux exigences européennes en matière d’émissions d’azote. Avec près de 4 millions de bovins, 12 millions de porcs et 100 millions de poulet, les Pays-Bas, gros producteurs et exportateurs de viande, font également partie des plus importants émetteurs d’azote de l’Union européenne.
Suite à un jugement du conseil d’État en 2019 au regard de manquements en matière de réduction des rejets d’azote dans l’environnement vis-à-vis des obligations européennes, notamment les directives habitats et oiseaux, le gouvernement néerlandais a eu l’obligation de réduire ses émissions afin de pouvoir reprendre les constructions engendrant de nouvelles émissions, c’est-à-dire les infrastructures mais aussi les exploitations agricoles, a expliqué Martijn Weijtens, conseiller aux Affaires agricoles à l’ambassade des Pays-Bas à Paris, à l’occasion d’une journée de conférence organisée par l’Idele le 16 novembre.
Pour ne pas bloquer l’économie, les Pays-Bas ont donc voté un plan de réduction d’émissions d’azote, visant - 50 % d’émissions en 2030 et 74 % des zones Natura 2000 sous le seuil critique en 2030. « Mais il n’y a pas d’objectif de réduction de cheptel », explique Martjin Weijtens. Pour autant, les agriculteurs savent que ces objectifs se traduiront quoi qu’il arrive par une diminution importante du nombre d'animaux d'élevage, évaluée à 30 %. C’est pourquoi des manifestations importantes se sont déroulées dans tout le pays pendant l’été, avec un soutien important de la part de la population.
« Face à cette mobilisation, un médiateur a été nommé, Johan Remkes, et son rapport rendu en septembre 2022 a apaisé la situation », souligne Martjin Weijtens. Ce texte ne remet pas en cause les objectifs initiaux, mais il reconnaît les efforts réalisés jusqu’ici par les agriculteurs et souligne leur mérite.
Parmi les recommandations issues de ce travail figure la proposition d’acheter en priorité les 500 à 600 fermes les plus polluantes, sachant que l’État a dédié un budget de 25 milliards d’euros pour des mesures de déplacement, relocalisation et changement d’activité. L’approche initiale est le volontariat, « mais n’exclut pas des expropriations si nécessaire », précise le conseiller agricole.
La réduction de cheptel semble en tout cas inéluctable. Plus de 11 000 fermes pourraient devoir mettre fin à leurs activités, et au moins 17 000 autres devront réduire leur nombre d’animaux pour répondre aux objectifs fixés. Une tendance qui va à l’inverse de la politique menée depuis l’après-guerre dans le pays et qui a fait des Pays-Bas le deuxième exportateur mondial (en valeur) de produits agricoles, et le pays à la plus forte densité d’animaux en Europe.
Cette position rend les Pays-Bas très dépendants aux importations d'aliments, avec des conséquences environnementales également significatives. Cependant, pour les représentants des agriculteurs, réduire le cheptel hollandais ne diminuerait pas les émissions d'azote à l'échelle mondiale, puisque la viande non produite aux Pays-Bas serait simplement importée d'ailleurs.