10 fois plus de cédants que de repreneurs : face à ce ratio, et au décalage entre les projets des candidats et les fermes à transmettre, la chambre d'agriculture Aura cherche à innover. Objectif : « rendre les offres de reprise plus attractives et communiquer de façon plus offensive » afin de séduire de nouveaux publics, explique Gérard Vigier, conseiller transmission dans le Cantal.
Pour aider les cédants à trouver des repreneurs, la chambre d'agriculture du Cantal mise sur les nouvelles technologies . (©Adobe Stock)
« 30 000 cédants sont inscrits au répertoire départ installation ou RDI en Auvergne-Rhône-Alpes (et seulement 1 300 prennent rendez-vous au point accueil transmission ou PAT) pour 3 000 repreneurs potentiels recensés dans les points accueil installation ou PAI ! », pointait au Sommet de l'élevage Laurence Romanaz, chargée de mission installation/transmission à la chambre d'agriculture régionale. Un ratio qui illustre parfaitement la nécessité, pour les agriculteurs proches de la retraite, de rendre leur ferme, et la communication sur celle-ci, plus attractives. Par quel(s) moyen(s) ?
Dans le Cantal, l'organisme agricole mise sur les nouvelles technologies. Mais lesquelles... Pour le savoir, écoutez Gérard Vigier, conseiller transmission, interviewé pendant le salon :
« Dans le département, nous avons 2 000 chefs d'exploitation de plus de 55 ans et un manque de candidats à la reprise, notamment en production laitière et en Gaec. Il faut être plus offensif en matière de communication, pour toucher de nouveaux publics qu'on a peu l'habitude de côtoyer. Pour attirer tout en étant efficace, nous devions nous doter d'outils modernes et appréciés de notre cible », explique-t-il.
Visualiser la ferme et son environnement, pour se projeter.
Dans le pays d'Aurillac, plusieurs offres de reprise ont été filmées en vidéo et publiées sur les réseaux sociaux. « Une belle présentation des fermes », par les cédants eux-mêmes et avec des vues d'ensemble et aériennes des bâtiments, extérieur et intérieur, du parcellaire, etc., qui permet de « bien visualiser l'exploitation », son environnement (géographique, économique, social), le collectif de travail et son organisation dans le cas d'une association, pour se projeter ou non. Cela permet de se faire rapidement une première idée, avant même de prendre contact, et de se déplacer surtout quand on vient de loin.
En immersion dans le parcours d'installation.
Quant aux repreneurs, leur sensibilisation pendant les salons, les forums des métiers, dans les centres de formation pourra s'appuyer sur la réalité virtuelle. « Des animations autour de ces casques, comme au Sommet de l'élevage, éveillent l'intérêt des visiteurs. Grâce à cette immersion dans les parcours professionnels et de vie de deux jeunes installés dans le Cantal, ils découvrent de façon dynamique et ludique les étapes à suivre, illustrées par des témoignages et la visite de chaque ferme comme s'ils y étaient. »
L'enjeu, comme dans la plupart des régions françaises, est en effet « d'adapter l'accompagnement à l'installation à ces nouveaux profils, et celui des cédants pour qu'ils transmettent leurs fermes plus facilement », insiste Laurence Romanaz. L'un des principaux résultats attendus : mieux correspondre les exploitations à céder et les attentes des repreneurs (point détaillé plus loin dans l'article).
Autant d'évolutions, sur lesquelles la chambre d'agriculture travaillent et dont certaines sont déjà mises en place, qui s'articulent autour de 5 axes :- Favoriser l'échange : au sein de la relation cédants/repreneurs, lors de la prise de contact (Farm datings, rallye des fermes à reprendre...) et ensuite pour une meilleure connaissance mutuelle (stage test aussi appelé de parrainage, appui aux relations humaines).
Le futur retraité doit, entre autres, « se préparer à accueillir son successeur, à lui transmettre ses connaissances ». Dans le cadre d'un parrainage et/ou d'une association préliminaire à l'installation, tous deux doivent apprendre « à travailler et décider ensemble ». Les partages d'expérience, entre pairs (exploitants bientôt retraités, jeunes installés) et entre producteurs en place et futurs agriculteurs, sont aussi privilégiés.
- Renforcer les mises en situation : visite d'exploitations, stages, crash tests, simulateur en ligne...
Le but est de « mettre les projets à l'épreuve pour voir si on va dans bon sens, et réajuster si besoin ».
- Faire du projet le fil directeur : faire émerger les idées (ceci très en amont de l'installation, bien avant le passage au PAI : « à ce stade on a des porteurs d'idées, pas encore de projets », note Laurence ; une formation spécifique est même proposée pour aider les futurs exploitants), les clarifier, puis construire, concrétiser et sécuriser son projet (voir schéma ci-dessous). Que ce soit pour l'installation comme la transmission.
« Ce n'est qu'après avoir commencé à bâtir celui-ci, que l'on peut s'engager dans la recherche de foncier, le 3P, les diagnostics, l'étude de faisabilité, le PE, commente la chargée de mission. Après s'être installé et avoir transmis, le suivi doit continuer avec des conseillers et des groupes d'échanges entre agriculteurs, afin de prendre du recul, partager ses pratiques, ses questionnements, ses difficultés, etc. »
Le parcours d'accompagnement à l'installation en Auvergne-Rhône-Alpes (©chambre d'agriculture Aura)
L'Auvergne-Rhône-Alpes compte 48 493 fermes et 62 526 chefs d’exploitation, d'après le dernier recensement agricole. 41 % des agriculteurs sont âgés de plus de 55 ans et dans 48 % des exploitations, au moins un des exploitants a cet âge voire davantage, avec une moyenne à 50,4 ans. 35 % des producteurs ont moins de 40 ans (cf. tableau ci-dessous).
Comme partout en France, la population agricole vieillit même si ces chiffres sont légèrement en deçà de ceux observés pour l'ensemble du pays : 43 % d'agriculteurs de plus de 55 ans, 50 % de fermes avec un exploitant de plus de 55 ans, âge moyen de 51,4 ans.
Région AuraFranceAgriculteurs > 55 ans41 %43 %Exploitations avec 1 exploitant ou + > 55 ans 48 %50 %Âge moyen50,5 ans51,4 ansSource : recensement agricole 2020.